Le chêne de Montpy, Le Mont-Dieu, Ardennes

En entendant à la radio que les conditions météorologiques étaient agitées les jours derniers dans les Ardennes, un vague sentiment de culpabilité m’a traversé. En effet, je ne vous ai jamais présenté les quelques spécimens rencontrés dans ce département, et compte tenu de la force des vents, j’espère que ce premier article ardennais ne fera pas, à mon insu, office de nécrologie!

Je vous emmène donc chez les Montagnards Divins, nom des habitants du Mont-Dieu, qui, avec ses 17 habitants,  a la plus petite population  et est la moins densément peuplée des communes Ardennaises. C’est au milieu de sa forêt, qui couvre environ 1100 ha, que se trouve la plus vieille chartreuse de France (XII siècle), la Chartreuse du Mont-Dieu et c’est à quelques centaines de mètres, au sommet de la colline la dominant que se trouve le vénérable chêne de Montpy.

Je n’ai pas réussi à élucider l’origine de cette appellation (je ne désespère pas trouver la réponse), il est aussi appelé comme le panneau l’indique « le gros chêne du Mont Dieu ».

Cet arbre a été répertorié par les forestiers depuis longtemps, car ses mensurations en font un arbre délite, 5.10 m à 1.30 en août 2015 (4.95 m en 2002), première branche à 13 m et hauteur de 33 m (la dernière mesure est celle indiquée par les forestiers et date un peu). D’autre part les habitants des environs y sont très attachés. En 1980, il y eut un tollé général lorsque l’ONF annonça qu’il avait été abattu, en fait  il s’agissait d’un autre gros chêne de la forêt.

Il possède un bel empattement compensant la cavité importante située à la base du tronc, cette réaction de consolidation est complétée par une autre bien humaine : trois câbles attachés à la cime de l’arbre et reliés à des plots de béton. Sage mesure, car l’arbre est situé juste en rupture de pente. Cette installation, ainsi que le nettoyage de la cavité, avaient été financés par l’état il y a une trentaine d’année, dans le cadre d’une opération de préservation des arbres remarquables.

En plus de ses caractéristiques naturelles, son histoire est intéressante. Durant la Première Guerre Mondiale, les soldats allemands abattaient pour leur besoins tous les arbres environnants (des chênes principalement), arrivés au pied de celui-ci, déjà considéré comme exceptionnel, le garde forestier aurait dissuadé l’officier en charge de superviser les travaux, de le couper, prétextant que Guillaume Ier, lors de la guerre de 1870, se serait reposé à son pied.

Les soldats auraient ainsi renoncé à leur funeste projet.

Par la suite, durant la Seconde Guerre Mondiale et à l’image du chêne d’Herméville-en-Woevre durant la guerre 14/18, les militaires français l’ont l’utilisé comme observatoire. Sa position dominante permettant de surveiller un large périmètre.

Des échelons avaient été installés pour accéder à une plate-forme. Ceux-ci furent retirés à la fin du conflit par un prisonnier allemand. Il ne reste que des cicatrices assez légères suivant la torsion du tronc.

Ce chêne n’est pas le seul arbre d’intérêt du secteur. Dans la prairie jouxtant la chartreuse, pousse un magnifique platane et un joli saule couché qui offrent tout deux leur ombrage au bétail, ce qui est salvateur durant les grandes chaleurs (tel que le jour de ma visite ou il faisait plus de 35°C).

Enfin, dans cette forêt alluviale, pour ceux qui trouveront un guide, il vous sera possible d’aller à la rencontre d’autres gros chênes, et de magnifique ormes lisses.

Je remercie André Thomé, ancien garde forestier (de 1969 à 2006) et passionné par « sa forêt », qui m’a fournit ces informations et photos ainsi que ce poème :

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8 réflexions sur « Le chêne de Montpy, Le Mont-Dieu, Ardennes »

  1. Yannick, elle est formidable cette forêt de Mont-Dieu de très beaux arbres, une histoire qui me rappelle le ‘temple de la raison’ pour éviter au chêne d’Allouville Bellefosse d’être coupé par les révolutionnaires.
    les Ormes lisses sont très intéressants en peuplement forestier!
    Le poème d’André Thomé fait bien ressentir le vécu du Forestier qui aime sa forêt.
    Merci.

  2. Très beau chêne forestier à l’image des belles forêts de l’Est.
    Une idée de l’estimation son âge ?
    En tout cas, les Montagnards Divins ont bien de la chance de vivre près de ce grand chêne.

    Le poème est bien sympa et la rencontre avec son auteur sera certainement très enrichissante.
    🙂 🙂 🙂

  3. Cette forêt alluviale du Mont-Dieu , chargée d’histoire , mériterait une gestion particulière , et pourquoi pas être classée réserve naturelle …c’est une forêt relique , ancienne propriété des moines Chartreux chassés à la Révolution ! depuis quelques dizaines d’années elle fut traitée comme une « forêt de production » avant tout ! les chênes , ormes , frênes et aulnes croissent ici les pieds dans l’eau une partie de l’année .
    J’aurais aimé que ces derniers vieux chênes de plus de 3,50 m de circonférence , souvent mitraillés , creux , porteurs de fougères épiphytes, ces vieux ormes , aulnes…continuent de vivre , dans leur milieu le plus longtemps possible . Ils font partie de notre patrimoine !
    Je sais , je fais trop « d’affectif par rapport au productif » , m’a t-on dit !
    Protéger , soigner le gros chêne du Montpy c’est parfait , mais d’autres de ses frères , beaucoup d’autres arbres , mériteraient le même respect ! ce n’est pas cela qui creuserait beaucoup plus le déficit de l’ONF.

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