Si l’if se retrouve dans la majeure partie des montagnes d’Espagne et de l’île de Majorque, il y est souvent très rare et isolé. Par contre on le rencontrera plus facilement dans les monts Cantabriques, principalement dans les massifs calcaires et dans des situations ombragées entre 500 et 1500m d’altitude. Généralement ce sont des spécimens isolés au milieu des forêts de hêtres.
La Tejeda* de Tosande est une concentration d’ifs remarquables. Certainement la plus importante d’Europe. Il en existe une autre moins importante à l’ouest de la Castille toujours dans la Cordillère Cantabrique sinon il faudrait regarder du côté de l’Angleterre mais rien de comparable avec Tosande et ses 743 ifs répertoriés. La plupart sont de très vieux arbres estimés comme millénaires avec des diamètres d’1,50 m pour les plus gros et une hauteur maximum de 15 m.
Leur âge est-il surestimé ? Les ifs Anglo-Normands de cet âge sont au moins deux fois plus gros. Mais les conditions en altitude ne sont pas les mêmes. Des hivers froids et neigeux, des étés secs et caniculaires sont à prendre en compte.
Voilà en gros pour planter le décor. Sachant que beaucoup d’entre nous ont un petit faible pour les taxus, je sens que je vais faire des envieux. Il y a plus de 20 ans que j’ai eu connaissance de ce lieu. Je l’avais découvert au travers de superbes photos sur Panoramio (l’ancêtre de google photo que les moins de 40 ans ne doivent pas connaitre). Je m’étais juré d’y allé un jour et mon voyage au nord de l’Espagne en était un peu(beaucoup) la raison.
Mais la Tejeda se mérite. Pour la trouver il faut partir d’une aire de stationnement et d’information aménagée sur la commune de Dehesa de Montejo.
Ensuite une superbe randonnée de 10 km avec avec un dénivelé de 428m. Sur les trois premiers kilomètre vous traverserez une prairie puis une vallée très rocheuse bordée de chênes verts, tauzin, sessile, aubépines, bruyères et houx. Après ces trois premiers kilomètres en pente douce vous parvenez à un plateau avec une grande prairie d’estive.
De là, le sentier repart sur la gauche dans une forêt de hêtres pour 2 km en pente très raide avec 200 m de dénivelé. Puis petit à petit les premiers ifs isolés commencent à apparaître au milieu des hêtres.
Sachant ce que j’allais découvrir je reste malgré tout stupéfait quand la forêt d’ifs s’étale majestueuse devant moi . La certitude d’être sur un site unique, une relique des temps passés, pousse au silence, au respect et à la contemplation comme lorsque l’on rentre dans une cathédrale. Tous les tronc sont tordus, vrillés, troués ou cannelés. Ces déformations sont elles génétiques ou dues aux conditions géologiques et climatiques. Je n’ai pu en trouver la réponse mais ces formes torturées rajoutent à l’atmosphère particulière qu’il ressort de la Tejeda.
Un platelage de planches de bois qu’il convient de respecter (il est formellement interdit de le quitter et de traverser en tout sens) nous permettra de faire une boucle autour de cette forêt et d’en mesurer toute l’exceptionnelle beauté.
Voilà, j’espère que ce récit de voyage vous aura plus. C’était mon petit cadeau de fêtes de fin d’année. Désolé Yannick les charmes bretons ce sera pour 2025. Promis, l’article est déjà prêt.
- *Forêt d’if: il n’y a pas de mot français pour la définir bien que l’on puisse rencontrer dans certains texte le mot « taxaie »