Renaud nous emmène à la découverte d’un if mythique.
Difficile de l’imaginer quand on arrive à Lo, mais cette petite localité rurale est une ville! Même sa fusion avec d’autres communes pour former l’actuelle commune de Lo-Reninge (3200 habitants) n’en fais que la deuxième plus petite ville de Belgique (derrière Messines). Plusieurs monuments témoignent encore de ce statut – nous y reviendrons – dont la Westpoort (porte de l’ouest). Cette porte est la seule des quatre portes de la ville à nous être parvenue, et la dernière trace des fortifications protégeant la ville. Mais ce monument du XIVème siècle est indissociable d’un vieil if qui lui tien compagnie: le « Caesarsboom » (« l’arbre de César »).
Selon la légende, Jules César y aurait attaché son cheval et fais la sieste sous son feuillage alors qu’il était en route pour aller conquérir le Royaume-Uni. Cette légende est évidement infondée: l’arbre n’aurait que 250ans. On la doit à Jean-Baptiste Gramaye qui la publie en 1612 en se basant sur des auteurs du siècle précédent qui pensaient qu’un campement romain se trouvait sous l’actuelle place du marché de Lo. Les fouilles n’ont jamais confirmé ces théories mais le nom de « Caesarsboom » a survécu.
Selon plusieurs sources, une peinture du XVIIIème siècle montrerait un arbre plus gros au même endroit. L’if actuel aurait donc eu un prédécesseur… mais en l’absence de toute nom de peintre ou titre pour retrouver cette peinture, j’émets un doute. L’arrivée de la photographie à la fin du XIXème siècle* donne des informations plus précises. Et là, surprise: l’if présence déjà un tronc d’un diamètre sensiblement identique à celui d’aujourd’hui. On peut aussi noter qu’il était muré.
La croissance de l’arbre est documentée à partir du XXème siècle, à savoir:
1924: 2,45m**
1978: 2,80m**
2011: 2,17m***
Le retour en arrière de la dernière mesure ne me surprend pas: arrivé devant l’arbre, j’ai même douté de parvenir à la mesurer: son tronc est chaotique, oblique, et au dessus du vide. J’ai péniblement fait deux mesures:
– 2,12m rien que pour le tronc principale;
– 2,59m avec le tronc mort du côté de la porte.
C’est donc plutôt la deuxième mesure qu’il faut prendre en compte – car elle comprend toutes les parties du tronc, morte et vivantes – mais j’avoue que cette mesure est à prendre avec des pincettes tant sa réalisation est laborieuse.
La première chose que j’ai vu en m’approchant du tronc, c’est la quantité astronomique de toiles d’araignée qui le couvre! C’est assez logique pour un if et le vide entre les bâtiments occupé par les anciennes douves n’arrange probablement rien en canalisant le vent vers l’arbre.
Le tronc est pour le moins chaotique: creux, avec des parties vivantes et mortes encore connectées et incliné au-dessus des anciennes douves. Je ne sais d’ailleurs toujours pas où l’if plonge ses racines: tout ses abords sont bâtis ou couvert de pavés… sauf les douves mais beaucoup plus bases. La ramure n’est pas moins chaotique: branches mortes, emmêlées ou renvoyées vers l’arrière par rapport à la route. Elle est soutenue par un structure métallique.
Ce vieux if n’est visiblement pas assez vieux pour avoir connu Jules César mais il est ancien – impossible à dater avec précision – et en bonne santé malgré son allure tortueuse et chaotique. Bref, un intéressant détour à seulement 30 minutes de route de Dunkerque ou Bergues…
Ps: Depuis l’if, un coup d’oeil à travers la Westpoort permet d’apercevoir l’hôtel de ville de Lo au bout de la rue. Son beffroi construite 1565 et 1566 est classé au Patrimoine mondiale de l’UNESCO. La petite localité a aussi vu naître la célèbre marque de biscuit Jules Destrooper en 1885: l’usine et le siège social s’y trouvent toujours.

**: Arbres remarquable de Belgique. Sans lieu. Administration des Eaux et Forêts. 247p