Les merisiers géants du mont Sainte Croix, Forbach, Moselle

Sisley nous emmène au fond des bois, avec des trouvailles que seul un œil expert comme le sien peut faire!

Petit retour en force avec un trio de fruitiers sauvages. Et oui, encore des fruitiers, mais cette fois ce n’est plus en zone de vergers, mais dans le monde forestier que nous allons être amené.

Tout commença par une lumineuse et froide après-midi de février, alors que je me rendais régulièrement vers la ville de Forbach, j’avais déjà repéré depuis quelques temps un panneau indiquant la chapelle du mont St Croix et en ce jour approprié je décidais enfin de m’y rendre en parfait touriste.

En empruntant l’allée pavée menant au lieu saint, je profitai déjà de la belle ambiance végétale qui entourait ces lieux. Sur place on tombe de suite sous le charme de l’emplacement, devant se dresse un édifice du XIIIe siècle bâti en bloc de grès rose et en parti fondé sur une barre rocheuse servant de socle de fondation. Un espace ouvert au public et abritant dans sa partie arrière un logis pour des religieux.

La chapelle est ornée sobrement mais c’est un ouvrage maçonné et taillé de belle facture.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Chapelle_Sainte-Croix_de_Forbach

Ayant fait le tour, je décidai alors de suivre un sentier pédestre grimpant le relief. Après avoir évolué pendant une vingtaine de minutes dans cette forêt typique (mélange homogène de chênes sessiles, de hêtres communs, pins sylvestres, de merisiers et de châtaigniers plantés pour leurs bois dans la région depuis le XIXe siècle et appréciant ce sol acide) de milieux escarpés sur sol gréseux, je commençai à longer un drôle d’endroit, une dépression d’environ un demi hectare entouré de petites falaises. C’est tout à coup que j’observai un beau peuplement de merisiers et profitant de ma situation élevée je compris de suite que j’avais a faire à quelque chose de singulier, ces arbres dépassaient aisément les plus grands jusqu’alors recensés (Monumentaltrees). En effet alors qu’en moyenne les plus beaux sujets de futaie atteignent entre 30 et 35 m, 35,72 m pour le record de l’espèce, là on arrivait facilement au delà de 36 m et en descendant dans la zone je vis rapidement que ça n’allait pas s’arrêter en si bon chemin. Le télémètre s’affolait de plus en plus, 37, 38,39,….jusqu’au verdict final de 39,6 m. Je n’en croyais pas mes yeux, le record venait tout bonnement d’être pulvérisé de de 3,9 m. Certains pourront dire que ce n’est pas exceptionnel mais il faut bien comprendre qu’on doit frôler la limite maximale de hauteur pour l’espèce. En effet cet arbre accolé à un autre en sa base a jouer à la concurrence depuis des dizaines d’années et comme sa situation géographique est très particulière, l’arbre croît au pied d’une falaise de 13,14 m en haut de laquelle poussent d’autres arbres d’une vingtaine de mètres, et cela combiné au fait qu’il est exposé plein Est, font que ces arbres n’ont eut d’autres choix que d’évoluer très haut pour compenser ce manque de lumière.

 

A situation exceptionnelle arbre exceptionnel, je ne doute pas qu’il doit y avoir d’autres cas de figures analogues pour bien des espèces, arbres de ravins, de gouffres,.. mais ici tout c’est bien goupillé pour donner du champion !!

Une documentation suisse de bonne qualité :

https://www.ethz.ch/content/dam/ethz/special-interest/usys/ites/waldmgmt-waldbau-dam/documents/SEBA/Baumarten%20Informationen/SEBA1_AS_ki_2000_FR.pdf

Pour faire un tour du secteur, il faut ajouter que je n’ai pu déterminer la vocation initiale des lieux, comme l’on peut voir de larges et longs sillons parallèles entre eux sur la moitié de la surface, on pourrait penser à un ancien site d’extraction de grès qui depuis s’est complètement fait recouvrir.

La végétation dominante est âgée d’environ 50-70 ans et se compose de beaucoup de plantes pionnières et post-pionnières : peuplier tremble, bouleau verruqueux, robinier pseudo-acacia, noisetier, sureau noir, sorbier des oiseleurs, érable sycomore, frêne commun, merisier, charme commun et chêne sessile. Les trois spécimens remarqués mesures respectivement 36,4 m pour 1,79 m de circonférence, 39,6 m pour 2,09 m et 38,6 m pour 2,22 m.

Coordonnées géographiques : 49°11’15.32  »N /6°55’35.09 »E (+/- 25 m)

Des circonférences d’arbres matures car en atteignant 70 à 80 ans pour le merisier on arrive en âge avancé bien que certains auraient de 100 à 120 ans.

Cette espèce a un rôle écologique important car elle colonise rapidement et drageonne facilement, de fait avec quelques autres elle favorise la reconquête du milieu, ses feuilles se dégradent rapidement et enrichissent le sol et elle favorise l’avifaune de par ses petits fruits forts appréciés pour leur douce amertume.

Son bois est d’une grande qualité, il est utilisé en menuiserie et ébénisterie, avec un ton allant de l’ambré clair au brun saumon. Pour le chauffage le rendement est optimal et sa croissance bien conduite amène souvent de beaux brins rectilignes.

Voilà qui clos notre expédition forestière. Après des années d’arpentage en sous-bois je dois bien constater qu’ici et là on trouve des parcelles très favorables à constituer de très grands arbres.

Mais jusqu’alors je n’aurai pas penser mesurer du merisier de ce rang, ils dépassent voir frôlent d’autres espèces bien implantés comme le frêne, le pin sylvestre, le chêne sessile et pédonculé, l’aulne glutineux, l’érable sycomore et le peuplier noir. »

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