L’Arbre d’or de Puygiron (Drôme)

Dans la vallée du Rhône, la poule aux œufs d’or avait l’apparence d’un arbre durant plusieurs siècles. Un arbre providentiel, venu d’extrême orient, à la faculté incroyable de changer ses feuilles en de précieux fils de soie après avoir été consommées par des chenilles. Comme le Châtaignier (arbre à pain) a permis de sauver de la famine des générations de paysans, le Mûrier blanc a quant à lui donné un fabuleux élan économique dans les campagnes sinistrées.
Mais ça c’était avant… avant que les nouvelles avancées technologiques du textile mettent un terme à la florissante industrie des soyeux lyonnais et que l’Arbre d’or n’intéresse plus personne. Il reste néanmoins quelques vieux témoins de cette époque, sous la forme de trognes rongées par le temps, isolés près des fermes mais le plus souvent alignés le long des chemins.
Parmi tous ces vieux mûriers qui peuplent encore nos campagnes, l’un d’entre-eux présente des caractéristiques particulières. Voilà le portrait d’un arbre singulier qui mérite le qualificatif d’Arbre d’exception !

Exceptionnel à plus d’un titre !
Tout d’abord par sa position au centre du charmant village perché de Puygiron. Un emplacement inhabituel et qui ne correspond pas à sa vocation d’arbre paysan destiné à être « plumé » tous les ans pour récupérer ses précieuses feuilles, nourriture exclusive des vers à soie (sériciculture).
Ses dimensions sont également exceptionnelles. Avec un tour de taille approchant les 5m de circonférence, il est le plus gros mûrier actuellement connu dans le département de la Drôme.
Mais le plus surprenant est certainement son âge présumé : 400 ans !!! Cet âge, qui ne peut être basé que sur une estimation en l’absence de document écrit relatif à sa présence au centre du village, ne correspond pas à l’engouement pour la sériciculture dans la région. Les élevages de vers à soie, en lien avec les soyeux lyonnais, se sont multipliés au XVIIIème et surtout au XIXème siècle. D’ailleurs, la majorité de nos vieux mûriers du Dauphiné ne sont pas âgés de plus de 200-250 ans.
Le mûrier blanc a été ramené de Chine spécifiquement pour alimenter les élevages de vers à soie. Mais un autre mûrier était présent en Dauphiné bien avant lui… Il s’agit du mûrier noir, originaire du moyen-orient, diffusé par les Romains et planté par tradition près des fermes en pied isolé. Il avait de multiples fonctions et ses feuilles pouvaient même servir de nourriture d’appoint en cas de pénurie de feuilles de mûriers blancs (mais la soie produite était de mauvaise qualité).
Le mûrier blanc de Puygiron a toutes les caractéristiques « sociales » du mûrier noir. Il présente d’ailleurs beaucoup de similitudes avec le Mûrier noir du Chevalier à Aubusson d’Auvergne dans le Puy-de-Dôme.

L’âge d’or de la sériciculture fait partie du passé, de notre patrimoine local historique, pourtant le mûrier blanc mériterait de conserver son surnom d’Arbre d’or. Bien-sûr sa fonction a changé mais son rôle dans nos campagnes est tout aussi important. La présence de ces vieilles trognes représente en effet de précieux refuges, des micro-habitats pour une multitude d’espèces animales et végétales. C’est assurément un habitat qui vaut de l’or !
🙂 🙂 🙂

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3 réflexions sur « L’Arbre d’or de Puygiron (Drôme) »

  1. Sacré morceau! L’écorce est effectivement de toute beauté, crevassée à souhait!
    La Bretagne en possède quelques sujets, à ma connaissance le plus gros (3.2m) est dans le Morbihan. Il s’agirait d’un mûrier noir, mais j’ai un doute, n’ayant pas vu les fruits…

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