Les châtaigniers des Ayres, Lozère

Après la présentation du « Tronc« , le plus gros châtaignier de Lozère, il va être difficile de vous émerveiller avec un autre châtaignier cévenol.
Pourtant, la vieille châtaigneraie de la place des Ayres mérite aussi toute votre attention. Ses données dendrométriques n’ont rien d’exceptionnel, mais elle a joué un rôle majeur dans l’histoire de la  castanéiculture lozérienne.

Le minuscule hameau des Ayres est placé à un endroit stratégique en plein cœur de la châtaigneraie lozérienne. Il se trouve à un petit col, à cheval sur deux communes : St André de Lancize et St Hilaire de Lavit.
L’endroit semble de nos jours bien isolé au milieu cette immense châtaigneraie, mais à une époque pas si lointaine (jusqu’au milieu du XXème siècle), il représentait une place incontournable dans la culture de la châtaigne en Cévennes.

Chaque automne, la récolte des châtaignes mobilisait toutes les familles, du plus jeune au plus âgé. C’était une tâche difficile et incontournable dans la vie des Cévenols. Mais dans les grandes propriétés, la main d’œuvre locale ne suffisait pas et les propriétaires devaient faire appel à des saisonniers. Ce sont surtout les Caussenards du nord de la Lozère qui venaient se faire embaucher pour cette occasion. C’était pour eux une véritable aubaine car à cette saison, l’activité agricole manquait sur les causses.
C’est sur la vaste place des Ayres que se tenait cette foire, « la grande loue des Ayres« , pour que les propriétaires puissent rencontrer ceux à la recherche d’un travail saisonnier. La fête se déroulait sur trois jours : « la petite loue » le dernier dimanche de septembre et « la grande loue » les deux premiers dimanches d’octobre. Le terme de « la loue » signifiait que les ouvriers étaient embauchés avec un contrat saisonnier sur trois semaines entre septembre et octobre. Les employés étaient nourris, logés et recevaient comme unique salaire des blanchettes (châtaignes sèches), véritable monnaie d’échange en Cévennes. Dans les propriétés plus petites, on faisait appel à l’aide des voisins qui étaient payés dans ce cas à « mi-fruits », c’est à dire à la moitié de leur récolte.
Le travail était harassant mais vital pour toute la région. Malgré la difficulté de la tâche, les châtaigneurs cévenols pouvaient atteindre des rendements impressionnants, comme le mentionne le livre « Le renouveau de la châtaigneraie cévenole » : une moyenne de 100kg de châtaignes par homme et par jour, mais certains parvenaient à dépasser les 200kg par jour !
Ces fêtes ne sont plus qu’un lointain souvenir (à voir les cartes postales anciennes de Gégé 48) car de nos jours, il règne au hameau des Ayres une atmosphère bien plus calme.

« Les hautes branches sonores des châtaigniers frémissent encore près de l’esplanade des Ayres, mais la loue des ramasseurs de châtaignes n’est plus qu’un souvenir. » (M.Liquière, Païs 105)

Le squelette d’un vieux châtaignier mort en bordure de route signale le passage du col mais aussi l’existence d’une châtaigneraie très ancienne.
Une aire de pique-nique a été aménagée à l’ombre d’un châtaignier multiséculaire au tronc magnifiquement tortueux.
En juin 2016, sa circonférence mesurée à 1,3m de hauteur est de 6,99m. La forme bosselée de son tronc mérite une prise de mesures à différentes hauteurs. A 1,5m du sol, son tour de taille est de 7,12m et la base avoisine les 8m.
Le vieux châtaignier a été régulièrement taillé, sa hauteur totale est faible, à peine 10m. 


Dans cette petite châtaigneraie, les arbres sont d’âges variés et proviennent de différentes périodes d’enrichissement de la parcelle.
L’un d’entre eux est encore plus gros que celui de l’aire de pique-nique mais présente un tronc très court. Une petite cabane rudimentaire est installée dans son houppier.
Sa circonférence à 1,3m de hauteur est de 8,40m et sa hauteur de 16,50m.
Un autre châtaignier impressionnant, dont une bonne partie du tronc a disparu, se trouve près du local à poubelles.

Ces vieux châtaigniers ont été le témoin de l’évolution du mode de vie des Cévenols. La fête de la loue a disparu, elle est remplacée de nos jours par la fête du PC et du travailleur lozérien. Elle a lieu les 25 et 26 Aout. L’ambiance est très festive et le repas fraternel est réputé dans toute la région.

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