Réédition de l’article suite au piratage.
Les villes du Languedoc dégagent une atmosphère très minérale où le végétal peine à trouver sa place. Montpellier, la capitale languedocienne, n’échappe pas à cette règle. Mais elle a un petit quelque chose en plus qui la distingue de ses voisines. Un petit plus qui fait toute la différence : son Jardin Botanique ! Le plus ancien de France, créé par Henri IV et dont l’incroyable collection de plantes médicinales a fait toute la renommée de la Faculté de médecine de Montpellier.
C’est donc tout naturellement que l’arbre emblématique des montpelliérains se trouve au cœur de ce jardin botanique.
Un arbre vieux de 400 ans, d’une espèce peu courante et transformé en un usage bien particulier… Trois spécificités qui rendent cet arbre triplement remarquable * * * ! ! !
Je ne vais pas m’attarder trop longtemps sur l’historique de ce jardin botanique, un sujet qui a fait l’objet de très nombreuses publications, mais je vous propose plutôt de regarder d’un peu plus prêt quelques arbres extraordinaires parmi les 3200 espèces présentes sur ce minuscule territoire.
Juste en quelques mots : ce Jardin botanique est un jardin universitaire indissociable de la Faculté de médecine depuis son origine en 1593 (un cas unique en France). Il a été créé par Pierre Richer de Belleval sur ordre d’Henri IV et devait s’inspirer de l’Orto Botanico de Padoue tout juste créé en 1545.
Sur près de 5 hectares, plusieurs ambiances différentes ont été façonnées pour que s’épanouissent une grande variété de végétaux. En effet, l’ambition de ce jardin a rapidement dépassé le seul intérêt pour les plantes médicinales utilisées pour l’enseignement de la médecine. Il est devenu un véritable laboratoire vivant de botanique.
Mais au fil du temps, l’intérêt pour d’autres jardins botaniques en France a quelque peu terni l’éclat de celui de Montpellier… Ce n’est qu’à partir des années 80 que les pouvoirs publics ont pris conscience de l’intérêt historique d’un tel patrimoine. De gros travaux d’embellissement et de restauration ont été engagés. A tel point, que j’ai l’impression d’avoir toujours connu le jardin botanique de Montpellier en travaux ! Mais il est bien connu que dans le sud, les grands chantiers prennent souvent des dimensions incontrôlables et s’éternisent plus que de raison. Dans cette ambiance particulière, je n’ai découvert ce fabuleux patrimoine qu’au goute à goute, à mesure de l’ouverture des différentes parties restaurées.
Même si la majorité du jardin a retrouvé toute sa splendeur (et même plus !), certaines zones restent encore fermées au public.
La partie historique du jardin se trouve au niveau de la Montagne de Richer. Le terme « montagne » est très exagérée puisqu’il ne s’agit en fait que d’un rehaussement de quelques mètres formant à l’origine plusieurs terrasses destinées à la culture des plantes locales. Le site a conservé l’appellation de Montagne de Richer même s’il ne reste plus grand chose de la structure d’origine. Mais au sommet de cette petite butte, un arbre a traversé les siècles et est devenu le symbole du jardin.
Un Filaire à larges feuilles (Phillyrea latifolia) planté en 1620 et qui est probablement le plus vieux représentant de cette espèce en France.
Les botanistes le rattachent à la famille de l’olivier. Il est exceptionnel de pouvoir observer un Filaire aussi âgé. Malgré qu’il soit assez fréquent à l’état sauvage dans nos garrigues de chênes verts, on le rencontre toujours dans sa forme arbustive.
On peut être surpris que le tour de taille soit si faible pour un arbre âgé de 400 ans. Sa circonférence à 1,3m du sol en juin 2015 est d’environ 2,70m (il est difficile d’être précis avec ce tronc bosselé). La croissance de cet arbuste méditerranéen est faible sur ce tertre rocailleux et il subit aussi de longues périodes de sécheresse estivales. Sa hauteur est estimée à environ 15m.
Le Filaire de la Montagne de Richer est célèbre pour la forme bosselée de son tronc, donnant d’innombrables cavités. D’ailleurs, il est de tradition de déposer dans l’une d’entre elles un petit mot écrit sur un bout de papier. Selon le désir de chacun, le message peut-être un mot doux destiné à celui ou celle aimé ou tout simplement un souhait à réaliser.
L’étrange Filaire devient alors un Arbre à souhaits ou la Boite à lettres des amoureux.
Pour les besoins de l’article, j’ai voulu connaitre le style des messages laissés… A l’heure d’internet et des multiples sites de rencontre, la correspondance amoureuse arboricole peut-elle encore avoir des adeptes ? J’ai donc ouvert quelques messages… mais c’était uniquement pour les besoins de la science et j’ai ensuite tout remis exactement à sa place !!!
Mais quelle surprise ! La majorité des messages était écrit dans une langue totalement étrangère au pauvre castor occitan que je suis… J’en conclue que cette tradition a du certainement se répandre dans les guides touristiques et que ce sont essentiellement nos visiteurs étrangers qui la perpétuent. En tout cas, à défaut de wifi, la communication « filaire » fonctionne très bien sur la Montagne de Richer !!
Mais au fait, à quand remonte cette curieuse pratique arboricole ? Et est-ce vraiment une tradition ancestrale du jardin ? Je n’en sais rien et je n’ai trouvé aucune information sur son origine…
Il est temps de s’éloigner de cette curieuse boite aux lettres et partir à la recherche d’autres trésors arboricoles.
Juste à l’entrée du jardin, un autre arbre fait l’admiration de tous les visiteurs.
Il s’agit d’un spectaculaire Micocoulier, d’une circonférence exceptionnelle de 4,91m à 1,3m du sol mesurée en novembre 2014. Un vieil ami ce micocoulier, je me sens toujours dans l’obligation de m’arrêter un instant à son pied à chaque nouvelle visite du jardin. J’ai longtemps pensé que l’on ne pouvait pas trouver plus gros en matière de micocoulier… Mais ça c’était avant… avant que je ne rencontre le monde des Têtards arboricoles et celui des chasseurs d’arbres d’exception. Il existe en effet des micocouliers de 5m de circonférence, comme c’est le cas au centre du village de Fox-Amphoux (Var). Celui de Bellegarde dans le Gard frôle aussi les 5m de tour de taille, il faisait précisément 4,95m en 2014.
Celui du Jardin botanique est âgé de 210 ans, il a été planté en 1804. Un âge vénérable pour cette espèce peu longévive. Mais quelques signes de dépérissement dans son houppier commencent à trahir cet âge avancé. Sa hauteur mesurée au dendromètre vertex est de 23m.
Pour finir cette première visite, on peut s’attarder un moment sur une espèce plutôt rare dans nos parcs. Le jardin botanique de Montpellier possède un spectaculaire Copalme d’orient (Liquidambar orientalis). C’est la variante méditerranéenne du classique Copalme d’Amérique qui orne si souvent nos parcs et jardins. Cette espèce, originaire des zones fraiches et humides des bords de rivières au sud de la Turquie et en Syrie, se plait très bien en terre occitane.
En juin 2015, sa circonférence à 1,3m du sol est de 3,57m et une hauteur totale mesurée au suunto de 24m. Des dimensions qui n’ont rien à envier à nos plus beaux copalmes d’Amérique.
A voir ce magnifique exemplaire, on peut se demander pourquoi il n’est pas plus fréquent dans nos parcs méditerranéens.
On peut signaler tout de même un autre bel exemplaire de Copalme d’orient dans le Jardin Lecoq à Clermont-Ferrand, introduit au milieu du XIXème siècle. Un panneau à son pied le présente comme l’un des plus beaux de France, mais sa circonférence mesurée en mars 2016 n’annonce qu’un timide 3,00m à 1,3m du sol… Un tour de taille qui reste bien inférieur à celui du Jardin de Montpellier.
En plein centre-ville, ce sanctuaire de la botanique est d’une richesse incroyable et on ne peut que se réjouir qu’il ait été l’objet de si nombreux travaux de restauration ces dernières années.
Je vous propose une suite à cet article, pour tenter d’élucider le mystère du plus ancien Ginkgo de France et découvrir aussi quelques autres merveilles arboricoles peu courantes et spectaculaires.
A suivre !
Bonsoir,
Je minterroge sur des arbres magnifiques qui se trouvent à l’écurie ou je monte vers Toulouse.
Une des habitantes des lieux m’a dit que c’était un micocoulier. Ce qui m’a amené a lire votre très chouette article. Pourriez vous me le confirmer si je vous envoie une photo ?
Dans l’attente intenable de votre réponse, je vous souhaite une bonne soirée
Bonjour,
Il est possible d’envoyer des photos via la page « contact » du blog.
Les micocouliers sont assez fréquents à Toulouse et certains atteignent des dimensions remarquables. Celui du cimetière de Terre-Cabade a même reçu le label Arbre remarquable de France en 2016 :
https://actu.fr/occitanie/toulouse_31555/le-label-arbre-remarquable-pour-un-micocoulier-de-30-metres-a-toulouse_3687078.html
C’est fait! Je te transfère le mail pour expertise, mais de prime abord il semble que s’en est un, mais il faudrait des photos des feuilles.