Le Mont Ventoux évoque dans notre esprit d’étonnants paysages lunaires, une montagne pelée couverte de cailloux mais aussi les exploits des cyclistes partant à l’assaut du Géant de Provence.
Encore une fois, écartons-nous de ces clichés trop faciles. Il suffit pour cela de descendre d’une marche (haute de 500m 😉 ) sur la face nord de cette montagne emblématique et vous aurez la surprise de découvrir une ambiance insoupçonnée, bien loin de l’image que vous vous faites du Ventoux.
A 1400m d’altitude, le Mont Serein offre ses pentes douces à une petite station de ski familiale… Voilà la première surprise du Ventoux ! Il est évident que la station ne peut pas garantir une hauteur de neige identique à celle de l’Alpe d’Huez, surtout en notre période de réchauffement climatique, mais elle offre tout de même la possibilité de skier en Provence depuis 1930… au moins quelques jours par an !
Une seconde surprise vous attend sur les pentes du Mont Serein, bien loin du souci du nombre de centimètres de neige pour déclencher l’ouverture des pistes. A cette altitude, la forêt a changé d’aspect. Le hêtre est apparu dès 1000m et se mêle désormais au pin sylvestre. A 1400m, les conditions de survie deviennent de plus en plus extrêmes, on entre dans la « zone de combat », les arbres les plus vaillants luttent péniblement dans cet environnement hostile et prennent des allures fantomatiques.
Des traces d’occupation humaine datant de la préhistoire ont été retrouvées sur le site du Mont Serein et la présence de deux sources ont permis de transformer cette bordure forestière en une zone pastorale parcourue par les brebis. D’ailleurs, la forme étrange des pins sylvestres est le résultat de la combinaison du surpâturage et des conditions climatiques extrêmes. On est bien loin de la silhouette habituelle du pin sylvestre, telle qu’on la rencontre en Forêt d’Orléans ou dans la Forêt alsacienne d’Haguenau.
En s’enfonçant plus bas dans la hêtraie-sapinière, d’autres pins sylvestres aux allures biscornues représentent les derniers témoins des anciens pâturages. Comme dans beaucoup de zones de montagne délaissées par l’agriculture, c’est la forêt qui reprend ses droits. Petit à petit, elle progresse et finit par refermer les paysages ouverts par l’homme. Ici, les vieux pins sylvestres à bout de force cèdent leur place aux nouveaux arrivants : le hêtre et le sapin pectiné.
Aux abords du Mont Serein, la hêtraie est bien implantée sur cette face nord. Contrairement à celle de la Ste Baume, elle ne revêt pas un caractère de forêt relique. La hêtraie se positionne dans un étage de végétation élevé, entre 1000 et 1400m, pour compenser sa latitude méridionale.
Dans sa frange la plus haute en transition avec les anciens pâturages, plusieurs bouquets de vieux hêtres, aux troncs courts et aux formes plus champêtres que forestières, ont servi de semenciers pour la progression de la forêt.
Dans ce secteur du Mont Serein, le promeneur attentif pourra observer l’évolution du paysage qui a marqué l’histoire du Mont Ventoux depuis le siècle dernier.
Si sur les pentes du versant nord, la forêt a progressé naturellement sur les zones délaissées par l’agriculture, sur d’autres secteurs plus difficiles, d’énormes efforts de reboisement ont permis de changer la physionomie du Géant de Provence. Mais il s’agit là d’une autre histoire, celle notamment de l’implantation de l’une de nos plus anciennes cédraies françaises…
Oh ! quel beau cadeau de Noël pour moi qui voue une admiration sans bornes au Géant de Provence.
J’y suis plus souvent montée en voiture qu’à pied (pour le vélo j’y penserai fortement dans une prochaine vie, promis 😉 ) mais je garde un souvenir inoubliable plus de vingt ans après (mais non le 1er de cordée ne s’appelait pas Alexandre 😀 ) d’une ascension côté sud qui permet de découvrir pas à pas (c’est le cas de le dire) les paliers de végétation. Si on part de la garrigue, les deux pieds dans la frigoule (thym) on se retrouve quelques heures plus tard à faire deux pas en arrière pour un en avant en cherchant à reprendre son souffle dans la pierraille parsemée de petites fleurs au sommet. Après avoir traversée des forêts aussi diverses que variées.
A faire absolument fin mai/début juin pour profiter des jours les plus longs, des températures clémentes et de la végétation printanière. Profitez aussi d’un jour où le Mistral est parti en vacances, parce que sinon ça décoiffe et pas que les pins sylvestres !
J’en profite pour souhaiter de très belles fêtes de fin d’année à tous les Têtards (arboricoles ou pas).
Y’a un problème Pat’… Lors de ton ascension par la face sud, sans oxygène et sans assistance motorisée, tu n’es pas passée par le Mont Serein situé sur la face nord. Tu as malheureusement loupé la belle hêtraie entrain d’absorber les vieux pins sylvestres biscornus. C’est dommage tu vas être obligé de renouveler ton exploit cette fois-ci par la face nord et en période hivernale, voilà un joli challenge pour 2018 😉
Tu as raison, les étages de végétation sont particulièrement bien marqués (quelque soit la face du Ventoux), c’est un vrai cas d’école cette montagne !
Comme tu dis, le choix de la période pour se balader sur le Ventoux est important, la canicule et le Mistral sont terribles sur le géant de Provence et peuvent rapidement gâcher la balade.
Dis donc je ne manquais quand même pas tant d’oxygène que ça pour ne pas me rendre compte que je n’étais pas passée par la station du Mont Serein 😀
Mais promis dès que le temps redevient propice j’y retourne et avec plaisir encore. Je cacherai bien la voiture… derrière ma paire de skis pour que l’illusion d’y être montée à pied soit parfaite 😀
Bonjour Castor et merci pour cette découverte! En suivant tes pas vers le carrefour des Faysses (oui, curieux nom…), nous sommes tombés sur un vingtaine de hêtres reliques en haut de la pente qui domine le carrefour depuis le sud-est (donc une petite centaine de mètres d’ascension en ligne droite vers la station). Ils ne sont pas trop visibles depuis le sentier botanique si l’on n’y prête pas attention.
Ces arbres figurent dans la publication d’Olivier Bricaud – « Arbres remarquables de Vaucluse ». Un régal. Au plaisir de suivre tes prochains épisodes.
Merci Marc pour ces compléments d’informations que je note précieusement pour une prochaine visite dans le secteur 🙂
Aurais-tu quelques photos à nous montrer, avec quelques mesures, pour se rendre compte de ce peuplement relique ?
Je n’étais pas au courant qu’il y avait eu une publication sur les arbres du Vaucluse (suite à l’inventaire de 2012 ?), il faudra que je me le procure, le département est un formidable terrain de chasse à arbres remarquables 🙂