Je vous révèle l’une des plus belles découvertes réalisées lors de l‘inventaire des arbres remarquables de l’agglomération grenobloise.
Bien que l’on soit à l’écart du tumulte de la métropole, ce petit coin de montagne est bien rattaché officiellement à l’agglomération.
Cette découverte, on la doit avant tout à l’oeil de lynx de Tristan et à ses pouvoirs de voyant extralucide permettant de détecter un trésor végétal en comparant l’évolution du paysage à partir d’anciennes photos aériennes. Son aide m’a été précieuse au cours de l’inventaire de la région grenobloise et à plusieurs reprises son expertise m’a mis sur la piste d’arbres fabuleux qui seraient passés à travers les mailles du filet.
Alors en suivant ses indications (Arbre potentiellement remarquable mais espèce non identifiée à cet emplacement), je n’avais plus qu’à me rendre sur place pour valider sa télédétection. Et encore fois… Bingo ! Il avait mis en plein dans le mille !
Un véritable trésor qui aurait pu rester caché encore de très nombreuses années sans cette méthode de repérage spatial (et spécial 🙂 )…
Il s’agit d’un bouquet de quatre arbres au pied d’un Habert (cabane de berger en montagne) sur les premiers contreforts du Massif de La Chartreuse. Quatre arbres qui s’offrent une vue panoramique sur la vallée de Sarcenas depuis plus de deux siècles !
Ils font partie du paysage depuis très longtemps, pourtant leur présence n’a rien de naturel. Ces arbres ont été plantés par l’homme. D’après le propriétaire, habitant le hameau, ils seraient âgés d’environ 200 ans. Il se souvient que son grand-père lui disait les avoir toujours connus énormes…
Cet ensemble arboré n’est pas homogène comme on pourrait le penser au premier coup d’œil. On y trouve un cerisier, deux majestueux tilleuls, mais aux dimensions encore un peu modestes pour être classés comme Arbre remarquable, accompagnés de deux ormes gigantesques donnant incontestablement au site une note de remarquabilité maximale.
Il s’agit plus précisément de l’espèce Orme des montagnes, parfaitement adapté à son environnement montagnard à 1100m d’altitude.
L’un des deux fait presque 5m de circonférence, ce qui en fait le plus gros orme (toutes espèces confondues) actuellement recensé dans le département de l’Isère.
L’ensemble de ce bouquet d’arbres vient frôler les 40m de hauteur (38m précisément) ce qui reflète d’excellentes conditions de croissance (replat en bas de pente arrosé par une source).
Les ormes ne sont pas rares dans le département de l’Isère, mais la maladie de la graphiose a décimé la majorité des vieux arbres depuis une quarantaine d’années. Les vieux ormes survivants sont donc systématiquement relevés dans les inventaires arboricoles et présentent une note de remarquabilité élevée au titre de leur résistance à la maladie. Ils représentent 14% des arbres remarquables inventoriés en Isère (base de 800 arbres en 2020).
L’un d’entre eux est même devenu tristement célèbre en devenant le symbole du combat contre la construction du nouveau stade de foot dans le Parc Mistral de Grenoble… il sera finalement abattu en 2004.
D’autres ormes représentent aussi de magnifiques marqueurs de paysage, comme Les Ormes du Méaudret sur le plateau du Vercors entre Autrans et Méaudre.
A noter, plus bas dans le hameau du Croz, un magnifique noyer de plus de 3,50m de tour de taille, planté il y a 90 ans par le grand-père du propriétaire. Une dimension rare qui fait de lui le plus gros noyer relevé actuellement dans l’inventaire de l’Isère (pays de la noix 😉 ).
Bonjour Castor, super ensemble d’arbres ! Les ormes sont impressionants. Et quelle hauteur ! On s’en rend bien compte sur la photo prise en hiver. Bonne idée de nous proposer des photos aux quatre saison d’ailleurs 😉
Merci à Tristan pour son oeil de lynx et à toi Castor pour cette découverte 🙂
Magnifique, c’est vraiment une trouvaille de choix, qui nous rappelle aussi que nos remarquables sont rarement là par hasard.
L’orme est vraiment une essence d’une grande beauté surtout à maturité. Je suis récemment tombé sur un spot dans le Morbihan, où se trouve une belle population jusque-là préservée, avec notamment deux beaux sujets (loin d’être aussi gros que les tiens) près d’un manoir. Malheureusement, la graphiose commence à faire ses premières victimes.
Aurais tu une photo des feuilles ? Dans le Jura, j’avais rencontré quelques sujets que l’on m’a annoncé comme orme de montagne, mais leurs feuilles n’étaient pas caractéristiques…
Merci pour vos commentaires, j’y réponds avec un peu de retard…
@Yannick : les distinctions entre les espèces d’orme ne sont pas toujours évidentes, surtout entre O. champetre et O. lisse (ou diffus), personnellement j’ai toujours un gros doute entre ces deux essences.
En revanche, l’orme des montagnes est nettement plus caractéristique avec ses feuilles bien typiques. Mais c’est vrai qu’elles peuvent présenter des formes assez différentes selon leur position dans le houppier, leur exposition (soleil/ombre) et même selon les individus. Par contre, au-delà de 1000m d’altitude, on a une forte probabilité pour que ce soit l’espèce Orme des montagnes.
Je confirme pour l’identification délicate des deux espèces, d’autant que l’orme champêtre (Ulmus minor) est assez variable. Les feuilles sont assez peu discriminantes, les fruits sont à l’inverse très différents et ils sont vraiment essentiels pour les identifier avec certitude. Ils apparaissent très tôt et seront formés d’ici quelques semaines, il ne faudra pas les louper ! Chez l’orme diffus, le tronc fait souvent des contreforts à la base ce qui n’arrive pas chez l’orme champêtre.
Ah oui, c’est vrai que certains vieux ormes présentent des contreforts prononcés à la base du tronc. Je ne savais pas que c’était une particularité de l’Orme diffus.
Merci Fred pour cette info 🙂